Maël — Ça c'est mon père. Liam. Si tu ne veux pas entrer dans l'équipe, faut surtout pas le croiser.
Cris — Aucun risque même en le croisant, je sais pas faire de cheval.
Maël — C'est sûr... La dame blonde à côté, c'est ma maman. Myriam. Elle est avec ma petite sœur, Anna.

Cristina eut un hochement de tête en passant subrepticement la main sur son ventre, encore plat. Un instant, elle se retrouva avec l'estomac noué, mais Maël poursuivit comme si de rien n'était.

Maël — Bon, après c'est ton frère donc tu connais, et Ali, et ton mec. Donc je t'apprends rien. Après c'est Dean, le maréchal ferrant de l'équipe. Il est avec Lou-Khyan, c'est la rousse.
Cris — Ils sont ensemble ?
Maël — Ouai, mais en ce moment ils se disputent pas mal alors je sais plus trop. J'ai entendu Siobhan dire qu'il avait vu Lou partir en pleine nuit avant hier.
Cris — C'est pas très bon ça... C'est lequel Siobhan ?
Maël — Le grand brun tout fin avec les yeux bleus. C'est le véto.
Cris — Il est pas mal...
Maël — Il est timide.

L'américaine et le petit cavalier échangèrent un regard et elle haussa des épaules. Il reprit la parole de lui-même après avoir avalé une petite poignée de pop-corn.

Maël — Ensuite t'as Saskia, c'est l'autre véto, mais elle est spécialisé des dents. Elle est en couple avec Calum, le grand tout fin qui a l'air un peu perdu.
Cris — Il est tout le temps comme ça ?
Maël — Non, c'était pire avant. Il est mieux maintenant... C'est le meilleur ami de mon parrain, Kwaïgon.
Cris — Celui qui fait peur. Le chinois.
Maël — Japonais. Il est japonais.
Cris — Ah super ! Il fait des sushis ?
Maël — Il fait tout ce que tu veux il cuisine super bien.
Cris — Et il est en couple ?
Maël — Ouai, avec Yennefer, la tatouée. Et se sont les parents de Io et Sora.
Cris — Ok.
Maël — Euhm... Ensuite t'as Neyla, la blonde. Je la connais pas trop, elle est un peu timide. Elle est partie pendant un moment puis là elle est revenu.
Cris — Elle est sympa ?
Maël — Ouai je l'aime bien. Elle vient d'Australie. C'est cool.

Le petit homme haussa des épaules en jetant un regard à Cristina avant de reprendre quelques pop-corn. Elle l'imita sagement.

Maël — Ensuite t'as Santana, l'autre coach avec Ale.
Cris — Sa principale collègue.
Maël — Ouai. De ce que j'ai comprit, elle est avec une fille.
Cris — Pas de danger donc.
Maël — Aucun.

Il secoua la tête et poursuivit.

Maël — Après t'as Ezra, le black. Il sort avec Inna, mais elle est pas là. C'est le meilleur pote de Walig.
Cris — Ah ! Je vois qui c'est lui ! Le gay.
Maël — Ouai. Sauf qu'il a eu une fille avec une fille... C'est le père de Cathleen. Et il est avec Jeff, le patron de Calum.
Cris — L'autre éleveur.
Maël — Ouai c'est ça.
Cris — Ok. Il nous reste le petit jeune là non ?
Maël — Ouai lui c'est Zek. Ezekiel. Il est sympa, je l'aime bien.
Cris — Un petit jeune quoi.
Maël — Ouai. Par contre il est très maladroit.
Cris — C'est bon à savoir.
Maël — Ouai, c'est clair. Tu verras aussi peut-être Angel, l'apprentie et collègue de Siobhan. Elle fait son internat vétérinaire ici. Et d'autres gens...
Cris — Et y'avait pas une autre éleveuse aussi ? Celle de la poulinière ?
Maël — Louna. Ma marraine. Mais elle est plus au Haras pour l'instant. Elle a eu des jumeaux et du coup elle les élève avec son mari. Ils habitent Chicago.
Cris — Ah !? J'aime pas trop Chicago mais... Pourquoi pas. Ils font de bonnes pizzas...
Maël — Ouai c'est ce qu'elle m'a dit dans sa dernière lettre. Se serait cool que le Haras s'y pose un jour.
Cris — Pourquoi t'irait pas la voir un jour ? Passer une semaine ou deux chez elle.
Maël — Faudrait que je lui demande... Et que je négocie avec papa. Se serait cool.

A nouveau ce petit haussement d'épaules désinvolte et une poignée de pop-corn avalée. Maël et Cristina étaient installés dans le bureau de l'élevage, séparé de la salle de réunion par une baie vitrée. Ils partageaient un pot de pop-corn et une bouteille de coca, comme s'ils étaient au cinéma. Ils avait commencé par essayer de deviner ce que disaient les cavaliers, pour finalement faire un tour de présentation. Même si Cristina avait été présenté à tout le monde, elle avait encore un peu de mal à se faire aux noms de chacun et aux rôles qu'ils avaient dans l'équipe. Alors une petite piqûre de rappel ne faisait jamais de mal. D'autant plus que c'était finalement assez plaisant de discuter avec Maël. Il était étonnement mature pour son âge tout en gardant une innocence bien à lui.  

Cris — Qu'est-ce que je dois savoir d'autre ?
Maël — Ben... Kwai se blesse très souvent, et il part souvent, il a une entreprise au Japon.
Cris — Oh...
Maël — Et Carter aussi mais du coup tu sais mieux que moi.
Cris — Oui c'est sûr... Ah ben tiens, en parlant du loup...

Carter sorti de la salle de réunion le premier, les autres se levaient petit à petit. Il leur sourit en s'approchant doucement, un peu moqueur.

Carter — Alors, le spectacle est sympa ?
Cris — Très ! On s'amuse bien. N'est-ce pas Maël ?
Maël — Oui ! C'était sympa ! Faudra le refaire.
Carter — Ouai mais on n'a pas de baie vitrée comme ça à chaque fois.
Maël — C'est vrai...

Maël haussa des épaules et se releva en entendant son père l'appeler. Il fit un petit signe à Cristina et sauta au bas de sa chaise pour filer en direction de la salle de réunion.

Carter — Qu'est-ce que tu fais par ici ?
Cris — Je suis venue chercher Ale pour le déjeuner.
Carter — Oh... Dans ce cas... Je te dis à plus tard...
Cris — A plus frangin !

Carter s'éclipsa, suivi de pas mal de ses collègues cavaliers. Finalement, Ale se détacha du groupe dans lequel il était pour s'approcher de Cristina avec un sourire légèrement carnassier. Elle était resté assise et il se pencha un peu pour venir chercher ses lèvres des siennes.

Ale — Salut ! Ça été ta matinée ?
Cris — Très bien et toi ?
Ale — Plutôt bien !
Cris — T'as le temps d'aller déjeuner en ville ?
Ale — Bien sûr ! Une proposition comme celle-là ça ne se refuse pas !
Cris — Alors c'est parti.

Elle sourit et accepta la main qu'il lui tendait pour se relever, le suivant sagement à l'extérieur de l'élevage...

* * *

Cris — Et moi ?

Alejandro eut un rire amusé et tendit à la jeune femme l'une de ses frites. Elle la prit entre ses dents avec un sourire satisfait avant de s'attaquer de nouveau à sa salade.

Ale — En même temps si tu voulais des frites il fallait en prendre !
Cris — Je préfère piquer dans les tiennes. C'est meilleur.
Ale — Évidemment !

Il sourit et elle lui rendit son sourire avant de revenir à son propre plat.

Ale — Ça va mieux tes nausées j'ai l'impression non ?

Il avait demandé avec sérieux, mais aussi une pointe de curiosité. Voilà un peut plus d'une semaine que la prise de sang prescrite par Ezra avait confirmé la grossesse de Cristina et il ne s'était pas trompé quand à la date. Elle en était déjà à huit semaines de grossesse, sans qu'elle ne se soit rendu compte de rien. Ce qui avait faussé son jugement, c'était quelques saignements, qu'elle avait attribué à des règles plus légères qu'auparavant, et mit le tout sur le compte du changement de contraception. Mais cela n'avait rien à voir, elle le savait maintenant. Grâce au traitement prescrit par Ezra, surtout à base de plantes, elle avait moins de symptômes, mais les premiers jours avaient été délicats. Elle avait eu des nausées pratiquement à chaque fois que le repas approchait et que le Haras se remplissait d'odeurs.

Cris — Ouai ça va mieux. Parfois c'est encore un peu dur sur certaines odeurs mais sinon ça va, c'est plutôt gérable.
Ale — Tant mieux...

Ils n'avaient pas encore abordé de nouveau la question de cet enfant, s'ils allaient le garder ou pas. Cristina avait eu le temps d'y réfléchir depuis que les résultats sanguins étaient tombé. Mais jusque là, elle n'avait pas vraiment osé en parler à Ale. Elle attendait le bon moment, bien qu'elle se rendait compte qu'il n'y aurait jamais véritablement de bon moment alors il fallait qu'elle se lance... Elle tapota sa fourchette contre une feuille de salade en l'observant avant de finalement prendre une légère inspiration et relever les yeux sur Alejandro.

Cris — Ale je... Je voudrais... Je voudrais qu'on parle un peu de... De cette grossesse...

Le coach releva les yeux de son hamburger-frites, intrigué et hocha de la tête, ne pouvant faire plus avec sa bouche pleine. Ce n'était pas plus mal. Avant qu'il ne puisse dire quoi que se soit, la jeune femme enchaîna, avec hésitation.

Cris — Voilà je... Je veux bien le garder mais... Mais je voudrais que tu sois conscient que je suis terrorisé par cette idée et que je ne suis pas... Très maternelle... Alors... Je vais avoir besoin d'aide pour le coup... Et qu'il est hors de question que tu m'abandonne...

Avec un air qui se voulait menaçant -sans vraiment l'être tant elle tremblait- elle leva sa fourchette vers lui en prenant une inspiration chaotique. C'était dit, elle ne ferait plus marche arrière. Mais elle n'avait pas menti, elle était morte de peur à l'intérieur rien qu'à l'idée d'avoir un enfant, qu'il soit de lui ou non ne changeait presque rien. Le coach ne put empêcher un sourire de naître sur ses lèvres et il reposa son burger avec lenteur avant de prendre une serviette en papier pour s'essuyer les mains. Avec douceur, il attrapa la fourchette pseudo menaçante pour la poser et prit les mains de la jeune femme dans les siennes pour les reposer sur la table. Avec sérieux malgré son léger sourire, il prit la parole.

Ale — Je ne t'abandonnerais pas, sois rassurée. Et je t'apporterais toute l'aide que tu veux, je te le promets...

Il sourit encore un peu plus, prenant un ton un peu plus rieur finalement.

Ale — C'est pas la peine de me menacer avec ta fourchette pour ça.

Cristina lui donna une tape sur la main, faussement vexée. Les hormones la rendait plus lunatique qu'elle ne l'était en réalité mais elle était toujours aussi peu rancunière, alors ça ne gênait pas vraiment le coach.

Cris — Te moque pas de la femme enceinte toi !

Il rit pour de bon, mais reprit vite son sérieux, caressant du pouce le dos de la main de la jeune femme, celle qu'elle ne lui avait pas retiré.

Ale — Merci Cristina...
Cris — Je sais pas encore si je vais le regretter ou pas mais... Je ne changerais pas d'avis...
Ale — D'accord...

Il lui sourit, véritablement reconnaissant, et la libéra pour poursuivre la dégustation de son plat. Elle récupéra doucement sa fourchette et fit de même, encore un peu troublée, mais bizarrement rassurée par ce qu'elle venait de faire et sa réaction. Elle n'était pas faite pour être mère, elle le savait. Mais sa sœur non plus et Aliénor non plus et pourtant... Elles y arrivaient très bien. Alors pourquoi pas elle ? Et puis Alejandro était déjà père. Il savait comment ça fonctionnait un enfant... Et il y avait toujours Carter, qui serait sans doute le plus ravi de tous. Et également sa propre mère... Elle était inquiète de cet avenir qui se profilait devant elle, plus incertain encore qu'il ne l'avait jamais été. Mais elle était enfin entourée, alors peut-être qu'il ne serait pas aussi terrible et funeste que celui que sa mère lui avait toujours prédit... Elle eut un soupir à cette pensée, et se rendit compte qu'elle avait détourné les yeux vers la rue sans la voir. Ale l'observait sans rien dire, respectant son silence et sa réflexion intérieure. Elle tourna finalement la tête vers lui et esquissa un sourire.

Cris — Il va falloir que tu rencontre ma mère à un moment quand même.
Ale — Mes beaux-frères et ma belle-sœur c'est pas suffisant ?
Cris — Je crois que non...
Ale — Zut ! Pendant un moment j'avais espéré y échapper...
Cris — Carter t'en a parlé ?
Ale — Un petit peu...

Il eut un froncement de nez caractéristique en montrant un petit espace entre son pouce et son index, qui s'agrandit un peu alors qu'il esquissait un sourire. Au vu des relations entre Carter et leur mère, la description n'avait pas dû être flatteuse... Mais il faudrait bien que cela arrive un jour... Elle ne comptait pas la laisser dans l'ignorance quand à sa grossesse de toute façon.

Cris — Et bien on va attendre encore un peu mais... Un jour ça arrivera immanquablement.
Ale — Tant que c'est le plus tard possible ça me va !

Ils échangèrent un sourire et Cristina acquiesça. Elle pouvait au moins faire ça pour lui...