Teardrop
Admin
Ep 04 | "Pure Imagination" - Mar 15 Déc 2020 - 13:54
« Il ne faut pas confondre ce qui est personnel et ce qui est important. »
Terry Pratchett
Terry Pratchett
La Corvette Stingray noire s'approcha lentement du bâtiment dans la nuit fraîche de ce tout petit matin d'automne. Le V8 qu'elle avait sous le capot ronronnait doucement. Lui seul venait déranger la tranquillité du pôle des éleveurs... La blonde, emmitouflée dans un manteau en laine gris, descendit les marches du perron et s'approcha de la voiture, son petit sac de voyage à l'épaule. Le coréen descendit de sa voiture pour venir ouvrir le coffre à la jeune femme et la saluer. Myriam s'approcha de lui et déposa une bise sur l'une de ses joues avant de l'accompagner jusqu'au coffre pour déposa son sac. Le coréen lui ouvrit la porte avant de se glisser derrière le volant et repartir au pas vers la sortie.
« T'as changé de voiture ? Fini Aston chérie ? »
La jeune femme lui servit un sourire espiègle auquel il répondit avec malice.
« Il était temps que je change. Je voulais essayer une Corvette depuis un moment alors... »
De nouveau ils échangèrent un sourire et la toute nouvelle Corvette du coréen quitta le domaine pour s'engager sur la nationale, en direction de Paris. Ils avaient quelques heures de route devant eux mais quand ils arriveraient dans la capitale française, le Haras commencerait sa journée...
***
Un bon paquet d'heure de vol plus tard et quelques fuseaux horaires de traversés, Myriam et Kwaïgon sortaient de l'aéroport de Great Falls passablement fatigués. Le coréen avait cependant eu la présence d'esprit de les faire voyager sur un vol privé. Il avait laissé sa voiture à Paris mais une jeep les attendait à la sortie du terminal. Ils embarquèrent et prirent la route de l'hôtel pour y laisser leurs bagages. Ils n'échangèrent pas un mot, ou le strict nécessaire pour la bonne marche de leur début de voyage. Le coréen était soucieux et cela se lisait dans son regard, quand il se perdait dans ses pensées. Ce qui n'arrivait pas souvent... La blonde elle, suivait le mouvement en tentant de rester calme et sereine. A vrai dire, elle ne savait pas à quoi s'attendre et ce qu'ils feraient de ce qu'ils découvriraient alors elle se laissait porter par le coréen.
Après un rapide passage à l'hôtel, ils prirent la route de l'hôpital. Kwaïgon gara la jeep dans le parking et étrangement, il ne sorti pas immédiatement du véhicule et resta immobile, les yeux rivés sur le tableau de bord. Il prit une grande inspiration silencieuse et croisa le regard de la jeune femme, qui lui sourit chaleureusement. Ou tout du moins, aussi chaleureusement que son état de fatigue et la situation le lui permettait.
« Ça va aller ? »
« Oui... »
Sans d'autre préambule, il sorti de la voiture et Myriam en fit autant. La blonde se laissa ensuite portée, laissant le coréen faire à chacune des étapes. La réception, l'attente, puis enfin, la venue d'information. Un charmant interne vint les chercher pour les conduire à la chambre de l'inconnue. Ils s'étaient présentés comme sa seule famille proche, ce qui n'était pas tout à fait faux. Pour l'instant, ils n'en étaient qu'au stade de la reconnaissance. Et pour l'instant, ils étaient les seuls à s'être présentés. L'interne les devança dans la chambre et dès que le coréen entra, il se tendit. L'interne ne vit rien mais Myriam, habituée désormais aux habitudes du coréen, le ressenti. Elle sut alors immédiatement que la femme qu'ils avaient devant eux était bien Moïra Abraams...
***
Kwaïgon, debout devant la fenêtre de leur chambre d'hôtel, bras croisé sur son torse, restait résolument immobile. Il avait été chamboulé par ce qu'il avait vu, c'était indéniable. Même Myriam, qui ne connaissait la jeune femme que de nom, avait été affectée par son état. Ce n'était pas très beau à voir. Le visage de la jeune femme était encore tuméfié et elle avait un bras dans le plâtre. Son gros ventre de femme enceinte surprenait et choquait. Ce n'était pas ce qu'on s'attendait à voir sur une comateuse. Myriam aussi était perdue dans ses pensées, assise dans un fauteuil. Un silence empli d'une tension étrange entourait la chambre. La blonde ne se rendit même pas compte que le coréen sortait de son mutisme pour répondre au téléphone. La conversation ne dura que quelques secondes avant qu'il ne s'approche de la jeune femme et dépose une couverture sur ses épaules. La jeune maman sorti alors à son tour de sa torpeur pour lever les yeux sur le coréen, lui servant un faible sourire.
« Je suis désolée... »
« Merci. »
« Qu'est-ce qu'à dit le médecin alors ? »
« Et bien... Si le bébé est en danger, ils feront une césarienne... Sinon ils attendront jusqu'au terme. Mais il y a des chances pour que Moïra ne se réveille jamais... »
Un court temps de réflexion s'ensuivit avant que la blonde ne reprenne la parole.
« Et qu'est-ce qu'il se passera pour le bébé ? »
« Et bien... Si Moïra ne se réveille pas, se sera à nous de le déclarer. Et soit on le déclare orphelin, sans père, soit... »
La jeune femme ne le laissa pas finir sa phrase et se leva d'un bond, indignée, tremblante.
« C'est une blague j'espère !? On ne peut pas lui faire ça Kwaïgon. Izikel est son père et je refuse d'ignorer ce fait. On lui cache déjà bien assez de choses comme ça. »
« Soit on déclare Izikel. Et dans ce cas là, le bébé sera quelques semaines entre les mains de l'administration, le temps qu'ils retrouvent Izikel et le lui annonce. »
« Parce que tu comptes ne rien lui dire toi même ? »
« Tu veux être celle qui lui annoncera la mort de Moïra ? »
Sans le vouloir vraiment, le coréen avait haussé le ton. Cette histoire le dépassait. Cette situation les dépassait tous. Le regard de la blonde se durcit.
« S'il le faut, bien sûr que je le ferais. »
« Je le sais... »
« Et je sais que tu ferais la même chose. »
Le coréen ne répondit pas et laissa le silence les envelopper de nouveau. Un silence qui apaisa les tensions. Bien sûr, elle avait raison. Elle avait toujours raison. Mais le coréen se garda de le lui dire. Il se contenta d'un faible hochement de tête et croisa de nouveau les bras sur son torse et se posta devant la fenêtre, avec délicatesse. Myriam se laissa retomber dans son fauteuil d'un geste las. Elle était fatiguée et dépassée. Mais ils savaient l'un comme l'autre qu'ils allaient devoir faire face et soutenir Izikel plus que jamais.
« Qu'est-ce qu'on fait maintenant ? »
« On attend... Parce qu'il ne nous reste que cela à faire... »
Il avait raison, elle le savait. Un long silence les enveloppa, insipide. Le doute les encerclait, s'insinuait en eux et les rongeait. Quand la jeune femme prit la parole, sa voix n'était qu'un murmure.
« Et qu'est-ce qu'il se passera ? »
« Dans un monde idéal ? Cet enfant permettra à Izikel de se battre et refaire surface. Ou mieux même, Moïra se réveillera, on mettra fin à ses problèmes et tout le monde vivra heureux au Haras. »
Mais ils n'étaient pas dans un monde idéal. Et l'un comme l'autre ne le savait que trop bien...
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