Hors série
Episode 01
Long Long Way ; Dark Dark Days IV ;
Banlieue d'Osaka - 10:46 pm } Un brise fraîche soufflait sur le parc, faisant vaciller avec légèreté les branches des sakuras qui s'étendaient en forêt épaisse et désordonnée à l'arrière de la minka, maison traditionnelle japonaise. Le soleil était couché depuis longtemps et la fraîcheur de la nuit avait envahit l'espace, mais cela n'empêchait pas le coréen de rester là, assit en tailleur sur la terrasse, face à l'immensité, surplombant la vallée illuminée au delà des sakuras nus. Des guirlandes de lumières parcouraient les sakuras, rendant le parc féérique. Dans son dos, la paroi de papier diffusait une lumière douce, éclairant faiblement le sol de bois sur lequel il était assit. Le dos droit, les mains sur les genoux, le coréen n'avait pas bougé depuis des heures, tantôt les yeux clos, tantôt à observer le monde, plongé dans ses pensées, les yeux perdu sur les lumières dansantes parcourant les branches de sakuras, telles des lucioles dans la nuit sombre. Cela faisait bien longtemps qu'il n'avait pas méditer ainsi, ou comme il préférait le dire "réfléchit au futur de son monde". Mais c'était primordial pour lui de faire le point sur les derniers événements. Tout c'était passé tellement vite...
Lorsque le jeune homme était entré dans cette chambre, il avait eu un instant d'arrêt. Une seconde pendant laquelle il s'était laissé submergé par la panique. Une seconde de pure horreur durant laquelle il avait été incapable de bouger ou de formuler une pensée intelligente. Une seconde qui lui était encore aujourd'hui douloureuse. Puis il avait inspiré profondément, soufflé, et réorganisé ses pensées. Il était redevenu presque lui-même. Bien qu'au fond, cette vision étrange le chamboulait un peu. Le premier choc passé, il y avait ensuite eu l'attente. Longue et fastidieuse. Il avait libéré Myriam pour rester des nuits entières auprès de Moïra, à guetter le moindre signe d'un réveil imminent. Quatre jours étaient ainsi passé. Les médecins avaient stoppé la morphine en espérant que la douleur provoque le réveil. Au début en vain et puis...
Il était deux heures du matin quand la jeune femme avait ouvert les yeux. Le coréen ne dormait pas et travaillait sur son ordinateur portable. Seul le bruit de ses doigts parcourant le clavier venait déranger le silence de la chambre, plongé dans une obscurité relative. Il était concentré sur ce qu'il lisait quand un faible murmure l'avait interpellé. C'était Moïra qui l'appelait. Il avait mit quelques secondes avant de se rendre compte de ce qu'il se passait.
« Moïra... »
« Kwaï... »
Une grimace de douleur avait tordu ses traits, avant qu'un gémissement rauque ne déchire l'air.
« Un médecin ! ... »
Il ne s'était pas fait prié. La douleur avait bien réveillé la jeune femme, mais pas celle conséquente à ses blessures. C'était son accouchement. Elle était en travail depuis quelques heures déjà et en demi sommeil depuis ce moment là. Désormais, elle était bel et bien réveillé et elle se tordait de douleur. Tout c'était ensuite passé très vite. Elle avait été emmené au bloc et après quatre heures d'une interminable attente, on lui avait ramené Moïra, ainsi qu'un berceau contenant une petite crevette rose endormie. Il avait laissé la jeune femme se reposer, donnant ses premiers biberons à la future "Cathleen" quand elle se réveillait. Au petit matin, la toute jeune mère avait rouvert les yeux et avait fondu en larme. Le coréen l'avait consoler comme il l'avait pu pour pouvoir connaître la raison de ces pleurs et elle lui avait expliqué sans détours.
« Je ne peux pas la garder... Je... Ils vont toujours me chercher... Comment est-ce que je vais faire ? ... Kwaïgon je t'en prie... Je t'en supplie... Aides-moi... »
Ce sur quoi elle avait de nouveau fondu en larme et plongé le coréen dans une intense réflexion...
« Et bien ça ne va pas être facile et ça fera un choc à Izikel mais la petite peut aller avec lui au Haras et toi chez mon maître au Japon... Mais il faut que tu parles à Izikel, tu ne peux plus l'ignorer Moïra... »
« Non ! Non surtout pas... Non... Dis lui... Dis lui que je suis morte... Je t'en prie ! Je t'en supplie Kwaïgon... »
« Je ne peux pas lui faire ça Moïra. »
« Si ! Tu peux et tu vas le faire ! C'est le seul moyen ! Kwaïgon ! »
« NON ! »
Il avait crié sans le vouloir. Cathleen s'était réveillé et sursaut et s'était mise à pleurer. Moïra avait également fondu en larme, en gros sanglots. L'heure suivante, la jeune femme avait argumenté en sa faveur en vain. Le coréen ne voulait pas cacher cela à l'irlandais, et encore moins lui mentir. Il pouvait éviter de leur parler à tous de sujet fâcheux et les garder pour lui, mais il se refusait à leur mentir ouvertement. Se serait les trahir. Trahir leur confiance et leur amitié. Et il était absolument hors de question qu'il fasse une chose pareille. Il avait fini par quitté la pièce pour aller fumer une cigarette, chose qu'il n'avait pas fait depuis des mois également. A son retour dans la chambre, le personnel était affolé et Moïra avait disparu. Il reçu un sms peu après de la jeune femme le suppliant de l'aider. Elle le mettait en porte à faux. Et il l'a haït pour ça. Peu importait les neuf mois durant lesquels ils avaient vécu ensemble. Peu importait tout le reste...
« Kwaïgon-san ? »
Le jeune homme ouvrit les yeux et souffla lentement avant de déplier ses longues jambes et se relever. Il se retourna avant de s'incliner respectueusement, mains jointes, devant son hôte.
« Tanaka-Sensei. »
« Le dîner est servi. »
« Très bien, j'arrive. »
Ils échangèrent un sourire et Maître Tanaka s'éclipsa après qu'ils se soient mutuellement salué. Ils avaient atterrit dans l'après midi à Tokyo avant qu'un des hommes de Tanaka ne vienne les chercher pour les emmener à Osaka en hélicopter. Ils avaient finalement rejoint l'une de ses demeures de campagne pour y trouver un peu de repos.
Le coréen rejoignit la salle à manger. Sur l'estrade de bois sombre sur laquelle se trouvait la table basse du repas, Nobu était déjà installé et l'attendait. Une femme d'un certain âge disposait les plats sur la petite table. Au vue de disposition des assiettes, Moïra ne se joindrait pas à eux. Ce qui n'étonnait guère le jeune homme. Elle était toujours convalescente et plongé dans un chagrin sans borne. Nobu Tanaka vivait de nouveau en centre ville de Tokyo, mais il conservait ses maisons au pied du Mont Asahi, celle-ci et une autre sur la côte, au sud de l'île. Son marché était toujours aussi florissant et il avait décidé, depuis peu, d'investir dans une entreprise un peu plus légale : un laboratoire de recherche et d'innovation pour les outils utilisé en médecine. Un projet un peu plus honorable que ce qu'il pratiquait jusque là, même s'il n'abandonnait pas la plus grosse source de ses revenus : le marché noir. Kwaïgon s'installa en face de Nobu et attendit en silence qu'on leur apporte les oshibori, ces serviettes chaude et humide servant à se laver les mains. Une fois qu'ils les ai rendu, ils attrapèrent leurs baguettes, les placèrent à l'horizontale entre leurs pouces et leurs index, mains jointes et saluèrent en murmurant « itadakimasu ». Ce après quoi Nobu commença à servir le saké et le coréen à remplir son bol de riz.
« Il est drôle de voir qu'à chaque fois que l'on se retrouve après un long temps, c'est autour d'un repas. »
« Je crois, mon cher Nobu, que c'est à cause de notre mutuelle amour pour la bonne nourriture japonaise. »
Le maître et mentor du coréen rit doucement en levant son verre de saké avant d'en boire une gorgée. Kwaïgon l'imita et ils poursuivirent leur repas. La tradition voulait que l'on se serve dans les plats pour remplir son assiette, indépendamment de leur ordre ou leur contenance. Ils avaient devant eux six plats assez divers, chaud et froid. Le coréen, bien qu'accoutumé au mode de repas à l'occidentale, n'en avait pas pour autant oublier la façon de se servir de ses baguettes. Après tout, il avait grandi et mangé des années durant avec des baguettes, cela ne s'oubliait pas en quelques années à la fourchette.
« Alors, raconte moi ta vie au Haras ! Se passe-t-elle toujours aussi paisiblement ? Pas vraiment à ce que je vois... »
Le coréen eut un sourire en coin avant de répondre. Nobu avait raison et soulevait un point assez important en plus d'être évident.
« J'essaie de les protéger des ombres qui grandissent dans le noir. »
« Parce que se sont des enfants ? »
« Parce qu'ils ne méritent pas de mourir à cause des cauchemars des autres... »
« Les tiens ? »
« Les miens, je les aurais supprimer seul... »
Le maître japonais sourit.
« De cela, je ne douterais jamais ! C'est grâce à toi que je suis de nouveau libre et je ne l'oublierai pas. »
« Merci, Tanaka-sensei... »
Ils poursuivirent leur repas en parlant de leurs quotidiens respectifs, omettant pour un repas, de parler des cauchemars qui peuplaient leurs ombres...
Halloween
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