Hors série
Izikel
Chasse à l'homme VII ;
Une pluie fine et froide tombait sans relâche depuis le milieu de la nuit. C'était le genre de pluie qui s'insinue au plus profond de vous et vous glace les os. Elle avait complètement détrempé le sol argileux du chantier et rendait le sol dangereux, même alors que le petit matin se levait. L'irlandais se tenait là, debout sous cette pluie fine, fixant d'un regard dur et hostile celui qui se tenait devant lui. Il tremblait, mais il ne savait pas vraiment si c'était de rage ou de froid. Son instinct lui disait de fuir, le plus loin possible, mais il ne le pouvait pas. La raison le lui interdisait. Il ne pouvait pas faillir à sa parole, ne pas tenir sa promesse. Il n'était pas comme ça. Il n'était pas comme cet homme en face de lui, sans honneur et sans valeurs, mercenaire des temps modernes. Il fallait qu'il en arrive à bout. Qu'il le détruise. Cela faisait presque deux heures qu'ils étaient tombés dans le puits de boue et qu'ils se battaient à mains nues, ayant perdu leurs armes. Le cercle d'une dizaine de mètres carrés dans lequel ils étaient se remplissait d'eau, doucement mais sûrement. Leurs blessures les handicapaient tout les deux rendant la chose plus cruelle encore. Il fallait pourtant qu'il en finisse. Qu'il puise en lui les ressources et attaque. C'est ce qu'il fit, au prix d'un effort monstrueux. Il approcha de son adverse, plus encore à bout que lui et après une lutte au corps à corps, il réussi à le faire basculer et lui maintenir la tête dans la boue, jusqu'à ce que la vie le quitte...
Il s'effondra sur lui même après avoir fait quelques pas et éclata en sanglot. Que venait-il de faire ? Pourquoi était-il là ? N'y avait-il donc pas assez de fantômes pour peupler ses nuits ? « Reprends-toi. » Il stoppa ses sanglots, fermant les yeux pour se concentrer sur sa respiration. « Pourquoi es-tu là ? » Aider Moïra. La venger, et l'empêcher de faire l'impardonnable. Il rouvrit les yeux et se hissa avec difficulté sur ses pieds. Il fallait qu'il sorte de là et qu'il retrouve Moïra. Au prix d'un effort titanesque il escalada la mare de boue qu'étais devenu le puits. Il rampa au dehors avant de se remettre sur ses pieds et observer un instant les alentours. Les réverbères lointains illuminaient la scène en douceur. Des corps inertes parsemaient le terrain boueux. Des dizaines. Il réprima un sanglot et avança à pas lent vers l'entrée du bâtiment, récupérant au passage un AK-47 et son chargeur plein. L'arme braquée devant lui il monta un à un les étages, avec prudence -ou du moins autant qu'il lui était possible. Il monta les cinq étages qui le séparait normalement de Moïra et pénétra dans le grand open space à peine achevé. Moïra était là, tenant en joue un homme assit sur une chaise. Autour d'eux, une dizaines de corps inertes, au sol ou affalé sur la grande table de réunion qui trônait au milieu de la salle. Aucun ne disait un mot : ils se fixaient avec autant de rage dans le regard l'un que l'autre. Le coup de feu ne le surprit même pas. Silencieux, seul le chuintement de la balle sortant de son silencieux se fit entendre et la chute du corps mort sur la table de bois. Moïra baissa doucement son bras le long de son corps et resta immobile. L'irlandais baissa lui aussi sa garde et attendit un moment, sans que rien ne se passe. La voix rauque du jeune homme fini par percer ce lourd silence.
Walig — C'est fini Moïra. Allons nous en.
Sans un mot, la jeune femme se retourna et le vit, pour la première fois depuis le début de leur opération. L'horreur se peint sur son visage et elle se précipita dans ses bras, retenant ses gestes tant son état était lamentable.
Moïra — Mon Dieu Izikel... Qu'est-ce qui s'est passé ?
Walig — J'ai eu quelques coriaces. Partons, s'il te plait... Je...
Submergé par la douleur, il lâcha son arme et tituba, tendant un bras pour trouver un appui, mais il n'y en avait pas. Il entendit Moïra répéter son nom plusieurs fois et vit brièvement qu'ils partaient, avec difficultés. Il se laissa choir dans la voiture de la jeune femme et ce fut le noir total...
Lorsqu'il ouvrit les yeux, il faisait jour. Il le voyait à la lumière grise qui s'infiltrait entre deux lourds rideaux bordeaux. Il était allongé sur un lit, dans une chambre. A la décoration, il s'agissait d'une chambre d'hôtel. Il n'y avait aucun bruit de l'extérieur, soit c'était bien isolé, soit il était dans un étage à deux chiffres. Il prit quelques minutes pour émergé complètement. Son corps entier était douloureux et même respirer lui était difficile. Il fini par se retourner pour constater que la place à côté de lui était vide. Elle avait été occupé, cela se voyait aux draps froissés et au drap rabattu vers le centre du lit, comme lorsqu'on se lève. Il se redressa doucement pour s'appuyé le dos contre la tête de lit matelassée et observer un peu plus son environnement. Ce seul geste lui arracha un gémissement de douleur. L'immobilité lui allait mieux. Mais il devrait bien finir par se lever à un moment ou un autre...
Il était bien dans une chambre d'hôtel, la carte d'un menu sur sa table de chevet en témoignait, tout comme le nom de ce dernier sur différents objets de la pièce. Il savait où il était désormais... La porte de la salle de bain attenante s'ouvrit, laissant s'échapper un nuage de vapeur et apparaître Moïra, nue et humide. En le voyant réveillé elle sourit et s'approcha du lit en quelques bonds avant de lui sauté dessus, lui arrachant un petit cri de douleur.
Walig — Argh... Moïra !
Moïra — Pardon ! Pardon, pardon, pardon...
Elle fit la moue et s'approcha plus en douceur, collant ses lèvres sur les siennes pour un baiser langoureux. Le jeune homme se laissa faire, avec un certain flegme.
Moïra — Tu me pardonne ?
La jeune femme fit une grimace ressemblant fort au chat poté du célèbre animé à l'ogre vert. Izikel ne put que rire, grimaçant rapidement à cause de la douleur causé par ce geste.
Walig — Oui, je te pardonnes. Mais ne me fait pas rire, c'est douloureux.
La jeune femme se redressa pour lui faire un garde à vous, ce qui lui arracha un nouveau sourire.
Moïra — Oui, chef !
Elle se reprit cependant bien vite et se glissa sous la couverture pour se coller à lui en douceur. La chaleur de ce contact provoqua une douce vague de frisson chez l'éthologue. Il ferma les yeux, savourant la simplicité de ce moment.
Moïra — Je pense que tu as une côtes ou deux cassées. Tu es sûr que tu ne veux pas aller voir un médecin ?
L'irlandais soupira sans pour autant ouvrir les yeux. Lorsqu'il avait reprit conscience dans la voiture de Moïra, il lui avait raconté ce qu'il s'était passé pour lui durant leur petite opération. Ils n'étaient que deux et au vu de l'ampleur de la tâche, ils s'étaient séparé au bout d'un certain temps. Ils avaient éliminés silencieusement la première vague de gardes armées avant de pénétrer à l'intérieur. Izikel s'occupait du rez de chaussé -le plus fourni en homme- alors que Moïra montait dans les étages à la recherche de sa cible. Il avait fait du mieux qu'il pouvait pour ne pas trop attiré l'attention de suite, mais le nombre était contre lui. Et immanquablement, le tout avait fini en une fusillade furieuse, jusqu'à ce que leurs chargeurs soient vide et qu'il termine au corps à corps. Cette seule image lui arracha un frisson d'horreur. Il ne voulait plus y penser, c'était terminé, Moïra et sa soeur n'étaient plus en danger.
Walig — Oui, je suis certain. Je n'ai pas prit de balle, c'est l'essentiel.
Moïra — Je dirais même que c'est un miracle !
De nouveau le jeune homme sourit, sans pour autant ouvrir les yeux. Il sentit la jeune femme bouger de nouveau, se décoller de lui pour venir l'embrasser de nouveau. Avec délicatesse, elle se mit à califourchon sur lui, passant délicatement une main dans ses cheveux. Ils étaient désormais plutôt long d'ailleurs, il faudrait qu'il pense à en faire quelque chose... Le baiser s'estompa alors que la jeune femme lui murmurait doucement à l'oreille.
Moïra — Tu es certain de vouloir rentrer au Haras ce soir ?
Cette fois il ne sourit pas, malgré que l'envie ne lui manque pas. Liam avait insisté pour qu'il les rejoigne au plus vite. Le Haras venait de déménager et il y avait eu une véritable hécatombe de petits bobos au sein de l'équipe. Il avait terminé sa mission, il pouvait revenir, ils avaient besoin de lui. Liam avait essayé de le convaincre que c'était pour son bien mais il avait décelé sans mal l'inquiétude profonde qui teintait son ton. Cela l'avait touché, même s'il aurait préféré rester un peu plus longtemps éloigné du Haras.
Walig — Oui... Et puis tu dois retrouver ta soeur toi aussi.
Moïra eu une moue dubitative et fini par soupirer, l'embrassant de nouveau avec une langueur nouvelle. Elle ne dit rien mais l'éthologue savait qu'elle aurait préféré qu'il reste...
Cette fois, son baiser dura et elle n'empêcha pas ses mains, encore chaudes de son passage sous les jets brûlants, d'explorer le corps de son partenaire. Izikel se laissa faire, posant ses propres mains sur les cuisses de la jeune femme, de chaque côté de ses hanches. Il ne réprima pas non plus le désir qui courrait dans ses veines, atténuant quelque peu la douleur qui l'envahissait à chaque mouvement. Heureusement pour lui, Moïra avait des gestes doux et lent, effleurant sa peau à vif et meurtrie. Son baiser sembla durer à l'éthologue une éternité et quand elle s'écarta de lui, il lui sembla qu'un vide se formait. Rapidement comblé par le regard brûlant et fiévreux qu'elle lui lança. Ils n'avaient pas besoin de mots pour se comprendre, mais cela avait toujours été ainsi entre eux. Délicatement, elle l'invita à s'allonger de nouveau, se débarrassant avec une lenteur calculé du boxer qu'il portait. Il gardait son regard fixé sur elle, alors qu'elle revenait au dessus de lui en effleurant sa peau du bout de ses lèvres. Arrivé à ses hanches, elle se redressa et, d'une main délicate, releva le t-shirt qu'il portait, dernier rempart de tissu sur sa peau. Au prix d'un effort douloureux, il se redressa pour lui facilité un peu la tâche et qu'il puisse ôter son t-shirt. Il se laissa retomber avec mollesse, réprimant une grimace de douleur. Sa respiration se faisait haletante à cause de cela, bien qu'il aurait préféré que se soit pour une autre raison.
La jeune femme le laissa se détendre, à nouveau à califourchon au dessus de lui, dessinant du bout des doigts le contours de ses muscles, évitant les ecchymoses qui lui coloraient le torse. Une fois le calme revenu et la douleur passée, elle se pencha à nouveau sur lui, tendre. Un baiser sur les lèvres, un échange de regard fiévreux, le désir, de plus en plus ardent, qui monte au creux de ses reins pour se propager dans le reste de son être. Il se laisse faire, incapable de prendre les choses en main sans hurler de douleur. Mais la chose semble convenir à Moïra. En véritable experte, elle fait attention, reste douce dans tout ses gestes. Leur étreinte est lente, presque silencieuse, ponctué seulement de leurs soupirs lascifs. Le plaisir endort ses sens mais il sait que tôt ou tard, il paiera ce moment, aussi agréable soit-il. Les mouvements se répètent, à peine plus rapide, exacerbant leurs sens. Jusqu'à cet instant ultime qu'est celui de la jouissance.
La demoiselle reste un instant au dessus de lui, perdu dans le baiser qu'elle lui donne, avant de basculer sur le côté et se blottir contre lui. Il ne tarde pas à s'endormir, complètement détendu et pour la première fois depuis longtemps, serein...
Lorsque le jeune homme émerge à nouveau, Moïra est assise au bord du lit et enfile une chemise à lui. Elle lui sourit en découvrant qu'il est éveillé et s'approche de lui pour l'embrasser à nouveau.
Moïra — Tu te sens comment ?
Walig — Mieux, bien qu'un peu douloureusement...
Elle sourit de nouveau, caressant sa joue de sa main posé en coupe sur sa mâchoire.
Moïra — Tu devrais aller prendre une douche, l'eau chaude te ferais du bien. Je vais aller chercher un truc à grignoter en attendant.
Walig — D'accord. Merci...
Un dernier baiser, plus chaste et elle se lève pour enfiler un jean et disparaître avec son sac. De son côté, il se lève doucement et se dirige vers la douche, grimaçant à chaque pas. Malgré tout, la jeune femme avait raison, les jets d'eau chaude lui font du bien et détendent ses muscles douloureux. Il passe beaucoup de temps sous la douche et l'entend revenir, mais elle ne vient pas le voir. Il fini par coupé l'eau, se sécher et s'habiller. Un coup d'oeil à sa montre lui indique qu'il ne lui reste plus beaucoup de temps avant de prendre son avion. Tout à coup, il regrette de ne pas avoir été plus ferme et rester plus longtemps en compagnie de la jeune femme. Son coeur se serre à cette pensée et il ferme un instant les yeux. Ce n'est pas un adieu. Ils se reverront. Il franchit la porte de la salle de bain et retrouve son sourire. Un mauvais pressentiment le gagne, mais il n'y prend pas garde. Il faut profiter de ces instants, et faire fi des sentiments qui s'emparent tout à coup de lui. Dans moins d'une journée il sera de retour au Haras... Il soupire et s'approche de la jeune femme pour la prendre dans ses bras. Elle répond à son étreinte, douce. Il hume le parfum de ses cheveux -aux fruits rouges- comme pour s'en imprégner.
Ce n'est pas un adieu. Seulement un au revoir...
Halloween
|
|